Compte-rendu du livre « À la rencontre des religions » de Pierre-François de Béthune
Père François de Béthune est moine bénédictin d’origine Belge, très impliqué en Europe au niveau du dialogue interreligieux et surtout inter-monastique. Après une première mission au Congo, il découvre, au début des années 1970, le bouddhisme et la voie du thé; une inspiration qui transparaît aujourd’hui dans ses réflexions sur l’accueil et l’hospitalité. En 2007, il publie chez Albin Michel L’hospitalité sacrée entre les religions. Son dernier recueil parfait cette réflexion en s’appuyant sur une longue expérience du dialogue interreligieux, la sienne et celle des grands pionniers qui l’ont inspiré.
Témoin précieux de la transformation des mentalités au sein de l’Église en ce qui a trait aux relation avec les autres religions, passant, selon ses mots, de « l’anathème au dialogue », Pierre-François de Béthune avoue avec beaucoup d’humilité que malgré que « nous ayons compris aujourd’hui qu’il fallait dialoguer,… nous n’en sommes pas pour autant capable » (p. 22). Beaucoup de travail reste à faire, et la sage position de l’auteur est qu’une théologie qui se penche sur la rencontre entre les religions se doit de partir de l’expérience de ceux qui s’y sont adonné pour ne pas « tourner à vide et devenir idéologique » (p. 58).
Cette réflexion sur l’interreligieux se trouve dans ce petit recueil nourri avec beaucoup d’expériences de qualité. Les plus grand, les pionniers, les défricheurs, ceux qui ont insufflé au christianisme un vent d’audace et d’espérance dans sa relation avec les autres religions : Henri Le Saux (Swami abhishiktânanda, 1910-1973), Thomas Merton (1915-1968), Raimon Pannikar (1918-2010) et Serge de Beaurecueil (1917-2005), avec qui l’auteur partage une profonde affection pour le thème de l’hospitalité.
Sans passer par un développement théologique élaboré, l’auteur réitère la fécondité de la voie de l’hospitalité pour aborder ces questions. L’hospitalité, moins directe que la pratique du dialogue, réfère cependant à une dimension plus existentielle de la rencontre avec l’altérité, peut-être plus à même de transformer les individus.
Un chemin se trace aujourd’hui pour la théologie, que Pierre-François de Béthune décrit en trois étapes : d’abord une profonde conversion du regard, passant de l’amour du frère (philadelphia) à l’amour de l’autre (philoxénia). Suivi de l’accueil de la pauvreté, surtout celle de notre point de vue, et de l’acceptation que ce qui nous rassemble est bien souvent « ce qui nous dépasse ». Enfin l’étape du partage inconditionnel, à travers les deux voies privilégiées par l’auteur, la prière et la méditation interreligieuses.
À la rencontre des religions est un petit ouvrage rempli de sagesse et d’expérience, fait pour inspirer les théologiens de demain sur la relève de l’interreligieux, mais également un vivant témoignage d’une « philoxénie » vécue au quotidien et les œuvres qu’elle peut inspirer.
Un compte-rendu de Frédérique Bonenfant
Pierre-François de Béthune, À la rencontre des religions. Nouvelles dimensions de la foi, préface de Dennis Gira, Paris, Bayard, 2015, 147 pages.
ISBN : 978-2-227-48821-2
Prix : 20,86 $