Critique du film «The Most Hated Woman in America»
Le drame biographique The Most Hated Woman in America, réalisé par Tommy O’Haver et produit par la compagnie américaine Netflix, raconte l’histoire vraie de Madalyn Murray O’Hair, fervente militante athée, notamment connue pour avoir fait retirer la prière obligatoire dans les écoles américaines et pour avoir fondé l’association American Atheists. Le film sorti en mars 2017 met en vedette Melissa Leo dans le rôle de Madalyn Murray O’Hair. L’actrice est appuyée par Juno Temple et Micheal Chernus, qui interprètent respectivement la petite-fille et le plus jeune des deux fils de Madalyn. Rory Cochrane interprète l’antagoniste David Waters, ancien employé de l’American Atheists et reconnu coupable en 2001 du meurtre, commis en septembre 1995, de Madalyn, de son fils Jon Garth et de sa petite-fille Robin.
Le film se base ainsi sur la véritable histoire de cette femme qui a milité corps et âme pour le respect du premier amendement américain, à savoir le droit de religion. Madalyn souhaitait surtout que chaque citoyen et citoyenne ait droit à ses croyances sans se voir imposer à celles des autres, que l’on soit athée, juif ou chrétien. Pendant l’heure et demie du film, on suit la protagoniste et sa famille dans une trame narrative non linéaire dont le point de départ est leur enlèvement par trois hommes. Par plusieurs retours en arrière, on découvre progressivement les faits marquants de la vie de Madalyn jusqu’au meurtre non prémédité d’elle et de sa famille.
Dans l’ensemble, l’œuvre est très réussie. L’esthétique visuelle des différentes époques semble bien réalisée. L’intérêt du film tient principalement dans le fait qu’il propose de découvrir le portrait d’une femme assez méconnue de l’histoire de l’athéisme. Du moins, dans le monde francophone. On y présente, de manière romancée, les dessous de l’une des plus importantes associations pour les droits des athées en Occident, association qu’elle aura dirigée jusqu’à sa mort, et qui aura créé une multitude de précédents en des termes juridiques, mais aussi en des termes purement sociaux. Il faut le souligner : Madalyn et une partie de sa famille auront consacré leur vie à défendre la liberté des non-croyants, mais aussi la séparation de l’État et de l’Église.
Le ton humoristique qui est très appréciable sera vite cassé par le côté dramatique de l’histoire. Après tout, le film raconte les événements qui mèneront au meurtre de trois personnes. Ainsi, l’humour constant – mais qui n’est pas nécessairement bon enfant et visiblement pas pour tout le monde – sera troublé par le meurtre soudain de trois personnages. Le problème est que cette coupure dans le ton trouble aussi le visionnement du film. On se demande comment la tension entre les victimes et les meurtriers, qui est tout de même divertissante, voire drôle par moment, a pu changer aussi radicalement pour mener à la mort de trois personnes. L’élément déclencheur qui mène à un triple meurtre est une tentative de viol qui ne se passera pas comme l’avait prévu l’agresseur et encore moins les deux comparses, qui décident quant à eux de sauver la situation en tuant deux autres personnes. On saute ainsi du coq-à-l’âne, en passant d’un ton d’humour jaune à une situation dramatique. Le tout se produit trop rapidement pour être efficace. Quelques moments annoncent tout de même la possibilité d’une agression, mais la tournure apparaît trop subite. De plus, une fois le crime commis, l’histoire déboule maladroitement vers la conclusion du film. On y voit l’arrestation, quelques années plus tard, du principal meurtrier, David Waters, pour ensuite se clore sur le défilement de quelques photos des véritables personnes ayant inspiré le scénario et des commentaires les concernant. Une finale plus en douceur aurait été souhaitée pour avoir un sentiment de complétude, car on reste sur notre faim. Par ailleurs, le film montre que l’American Atheists aurait baigné dans la fraude et les paradis fiscaux. Il aurait été appréciable d’offrir une plus grande place à cet aspect de l’histoire, malgré qu’il s’agisse d’un élément ayant mené à l’enlèvement des personnages, élément déclencheur du film.
Malgré ses défauts, le film saura être apprécié par cette histoire méconnue de l’athéisme américain. Les spécialistes des phénomènes religieux comme le grand public pourront y trouver leur compte. Un bon divertissement, tout en étant une bonne porte d’entrée pour stimuler l’intérêt d’en apprendre un peu plus sur l’athéisme.
The Most Hated Woman in America est disponible sur Netflix.