Critique du film « Le pape François »
Réalisé par Beda Docampo Feijóo et inspiré de la biographie du pape François (Francisco. Vida y Revolución) publiée par la journaliste vaticaniste Elisabetta Piqué – qui a d’ailleurs participé à la réalisation du film à titre de consultante –, Le pape François (sorti en version originale en 2015) raconte le parcours du premier jésuite d’Amérique latine, le père Jorge Mario Bergoglio, à accéder au trône pontifical. Si la narration présente quelques scènes de la jeunesse du futur pape François, notamment sur son choix d’entrer en religion au grand dam de sa mère, l’histoire est principalement centrée sur la rencontre et l’amitié qui s’est progressivement développée entre une journaliste – inspirée d’Elisabetta Piqué – agnostique et célibataire, Ana, chargée de couvrir le conclave de 2005 et l’archevêque de Buenos Aires, Jorge Bergoglio qui allait accéder à la papauté après la démission de Benoîx XVI (Joseph Ratzinger) en 2013.
Sans prétendre être un documentaire, ce biopic désire plutôt présenter un portrait de l’homme qui se cache derrière le Souverain pontife, le père Jorge comme il préfère être appelé même après son élection pontificale, en soulignant à la fois son humilité, sa modestie et sa générosité envers les plus démunis de notre société de même que son combat constant contre l’injustice sociale, la pauvreté, le trafic de drogue, la corruption, la dictature militaire et la pauvreté : « mon peuple est pauvre, et je suis l’un de vous » s’exclame-t-il lors d’une célébration liturgique en plein cœur des bidonvilles de Buenos Aires. Ce portrait, qui frôle l’hagiographie, a le mérite de mettre en lumière certains traits de la personnalité – principalement positifs – du père Jorge qui permettent de mieux comprendre la portée des paroles et des actions de ce pape souvent qualifié de révolutionnaire en raison des réformes – tant du point de vue des mentalités que des institutions – qu’il désire introduire au sein de l’Église catholique, particulièrement au sein du Vatican où, selon lui, « il est plus facile de perdre la foi que de la trouver ». Par conséquent, le titre de la version originale Francisco. El Padre Jorge évoque davantage la substance de ce film centré sur le père Jorge – sur l’homme profondément marqué par la pensée de saint François d’Assise : « commencez par faire ce qui est nécessaire, puis ce qui est possible, et vous ferez l’impossible » – plutôt que sur François – sur le pape dont on n’entrevoit la figure que très brièvement en conclusion de cette production cinématographique. Il ne faut donc pas s’attendre à en apprendre davantage sur les critiques qu’il suscite en tant que Souverain pontife.
Si le film comporte certaines longueurs, s’il passe sous silence certains traits de personnalité moins flatteurs du père Jorge – également connu pour son fort caractère et ses colères – et s’il n’évoque que partiellement certains dossiers sensibles, particulièrement celui de sa possible collaboration à la dictature militaire argentine alors qu’il était supérieur provincial des jésuites de Buenos Aires – notamment l’accusation d’avoir livré deux prêtres à la junte, une accusation qu’il a formellement rejetée –, il dresse néanmoins un portrait assez réaliste – quoique parfois forcé – et permet de découvrir certains aspects du passé méconnu de cet homme ordinaire au destin extraordinaire.
Un compte-rendu de Steeve Bélanger