Compte-rendu du livre La désobéissance civile et nous de Guy Durand
Dans ce petit livre, Guy Durand, professeur émérite de l’Université de Montréal, théologien et juriste spécialisé en éthique, se donne comme objectif d’éclairer le débat entourant le concept de désobéissance civile. Un concept qui, selon lui, fut remis à la mode lors du Printemps érable québécois. En trois parties, Durand aborde les origines de la désobéissance civile, décrit les outils utiles à sa compréhension (soit l’éthique et la morale) et analyse ce que représente la notion même de désobéissance civile.
Grâce à une formule question-réponse, l’auteur va droit au but. Les avantages se font sentir d’entrée de jeu : on évite les détours théoriques, les subterfuges littéraires et les égarements rhétoriques. De plus, les propos sont simples, concis et suffisamment expliqués pour éclipser tout brouillard conceptuel inutile.
À la lecture du titre de cette courte brochure (à peine 100 pages), il est légitime de se demander où se situe le lien entre la désobéissance civile et le religieux. La réponse est simple : le lien réside chez ceux qu’il considère comme les « premiers » désobéissants. Dans le premier chapitre, Durand fait remonter le concept au monde gréco-romain et judéo-chrétien en citant la pièce Antigone du dramaturge Sophocle, ainsi que Jésus de Nazareth. Puis, les exemples s’enchaînent. Au Moyen Âge par exemple, le pape pouvait retirer le pouvoir d’un roi – pouvoir généralement conçu comme divin –, donnant ainsi la possibilité au peuple de ne plus respecter les lois. Sans oublier que Durand se permet de citer à plusieurs reprises Thomas d’Aquin, ce religieux dominicain célèbre pour sa massive Somme théologique et ses réflexions philosophiques qui marquèrent à jamais la pensée occidentale. Autre origine parente avec le religieux? La Renaissance. Que ce soit à travers la Réforme protestante de Luther et Calvin, pour qui « la vocation de chacun à la connaissance de Dieu et de sa loi selon aucun intermédiaire », ou encore à travers le courant humaniste, dans lequel on refusa toute monarchie disant venir de Dieu, il est possible de réaliser rapidement que le religieux n’est jamais bien loin. Martin Luther King, dont le sous-titre du livre mentionne le nom, était lui-même pasteur protestant. Sans oublier Léon Tolstoï, ce célèbre écrivain que l’on peut qualifier d’anarcho-chrétien, lui-même garant de la désobéissance.
Dans le second chapitre, Durand explique que la notion de morale, qui est par réflexe associée à la religion, n’est pas si différente de l’éthique, une notion souvent perçue comme séculière. Pour l’auteur, la morale est distincte de la religion. Alors pourquoi toutes les religions s’y intéressent-elles? Pour l’unique et seule raison, nous dit Durand, que toutes les religions s’intéressent au salut de l’homme dans sa totalité et donc inclusivement à sa conduite morale. L’auteur ajoute que philosophes et théologiens s’entendent sur une chose, « la conscience est la règle de moralité ». Et si les religions présentent souvent une morale d’obéissance, Durand répond qu’il s’agit là d’une tendance inhérente à toute institution.
Quant au dernier chapitre concernant la définition de désobéissance civile et à l’appendice dédié à expliquer la grève étudiante de 2012, ils n’abordent plus le religieux. Toutefois, la compréhension du concept de désobéissance civile n’en reste pas moins efficacement présentée. Certes, La désobéissance civile et nous est un livre simple et court, mais son propos a l’avantage de présenter le concept sous un angle différent où le religieux à une grande place d’un point de vue social et historique.
Un compte-rendu de Hugues St-Pierre
Nombre de pages : 104
Prix de l’édition papier : 9,95 $ CAD
Prix de l’édition numérique : 6,99 $ CAD
ISBN: 9782762135978
ISBN ePub : 9782762135992
ISBN PDF : 9782762135985