Compte-rendu du livre « Symboles bibliques, langage universel. Pour une théologie des deux Testaments dans les sciences humaines » de Marc Girard
Membre de la Commission Biblique Pontificale entre 1996 et 2008 et professeur émérite de l’Université du Québec à Chicoutimi, Marc Girard est un théologien bien connu pour ses travaux exégétiques, particulièrement sur les symboles bibliques. Après la parution du premier tome de ce diptyque en 1991 (Les symboles dans la Bible. Essai de théologie biblique enracinée dans l’expérience universelle, Montréal/Paris, Bellarmin/Cerf), il aura fallu attendre près de 25 ans pour que l’étude complète soit enfin publiée permettant ainsi de rendre accessible le fruit de nombreuses et méticuleuses années de recherche. Ce délai aura également permis à l’auteur d’apporter quelques modifications et précisions à sa première mouture en prenant en considération les remarques critiques qui lui avaient été alors adressées, notamment par l’ajout d’un index thématique et d’un index des citations scripturaires qui facilitent indéniablement la consultation des 2040 pages de ce volumineux ouvrage de référence.
Loin de considérer que son étude constitue la somme d’une théologie biblique, une vérité absolue et non contestable, Marc Girard la présente plutôt comme l’œuvre d’un défricheur qui a eu le courage de « l’explorateur naïf désireux de percer les mystères de la jungle » (p. 1901) que constitue, métaphoriquement, les symboles de la Bible considérée dans son entièreté, c’est-à-dire avec l’ensemble des textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, incluant les textes deutérocanoniques. Car, pour l’auteur, l’étude exégétique de la Bible souffre encore de nos jours d’un « traitement séparé et quasi dichotomique des deux Testaments » (p. 1902). Non seulement Marc Girard a le mérite d’aborder la Bible en tant qu’œuvre unique et indivisible, du moins dans la perspective chrétienne, mais il a le mérite également de le faire en fondant son étude exégétique des symboles bibliques « sur une base transculturelle, universelle » (p. 1901). Avec une telle approche, affirme-t-il avec raison, « la Bible n’apparaît plus détachée, isolée, mais profondément enracinée dans le terreau de l’expérience humaine à tous les âges chronologiques et sous toutes les latitudes géographiques » (p. 1902).
Marc Girard a effectivement tenté dans cette étude d’aborder sous différents plans et angles (psychologique/onirologique, anthropologique, historique) les principaux symboles bibliques afin de montrer que ceux-ci s’inscrivent plus largement dans un terreau anthropologique universel, dans un patrimoine universel que la psychologie des profondeurs nomme l’« inconscient collectif ». Par conséquent, au-delà de certains particularismes propres aux récits bibliques, les principaux symboles que l’on retrouve dans la Bible se révèlent universels, car ils se sont humainement partagés, à différentes époques, par toutes les cultures. Ainsi, pour l’auteur, « la langue première, la seule qui soit innée et, en principe universelle, c’est la langue du symbole » (p. 50). Le lecteur ne devrait donc pas être décontenancé – car il partage également cet « inconscient collectif » avec le reste de l’humanité d’hier et d’aujourd’hui – et retrouvera dans cette étude de nombreux symboles bien connus tels que le feu, l’eau, les ténèbres, les nuages, les animaux, les chiffres, le vêtement ou les parties du corps, pour n’en nommer que quelques-uns. Ces symboles sont abordés en deux temps : d’abord à partir de considérations générales dont les contours sont précisés au fur et à mesure que progresse la réflexion de l’auteur, et ensuite à partir des textes bibliques qui font l’objet d’une attention particulière. Par conséquent, cette étude s’adresse non seulement à ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la Bible, mais également à ceux qui désirent mieux comprendre certains des principaux symboles universaux.
Mais encore faut-il comprendre en quoi consiste véritablement un symbole, tant ce concept est flou et souvent impalpable. Afin d’en préciser les contours, Marc Girard part d’une réflexion à la fois terminologique, méthodologique – inspirée, entre autres, de penseurs tels que Mircea Eliade, Paul Ricœur, Carl G. Jung, etc. –, épistémologique et typologique qui, bien que pouvant être rebutante pour un néophyte, est pédagogiquement bien élaborée quoiqu’un peu longue et parfois laborieuse pour un lectorat plus avisé. Cette volonté de l’auteur de rendre accessible sa réflexion au plus grand nombre de lecteurs, qu’ils soient des érudits ou des non-initiés, risque néanmoins de causer quelques irritants tant aux premiers – auxquels sont adressées les nombreuses et précieuses notes en bas de page – qu’aux seconds – auxquels sont adressées les nombreuses précisions explicatives dans le texte. Malgré cela, l’étude de Marc Girard suscitera un vif intérêt, car il constitue un imposant travail d’érudition et de synthèse qui deviendra un ouvrage indispensable de référence dans le domaine de l’exégèse et des symboles bibliques.
Un compte-rendu de Steeve Bélanger
Marc Girard, Symboles bibliques, langage universel. Pour une théologie des deux Testaments dans les sciences humaines, Montréal, Médiaspaul, 2016, 2040 pages (2 volumes).
ISBN : 978289760058
Prix : 90,00 $